Le vandale a finalement été jugé (voir ici et là). Le tribunal a retenu, dans son jugement rendu hier, vendredi 10 mai, la circonstance atténuante « d’altération mentale », contrairement aux réquisitions du ministère public. Sept mois de prison… Si l’individu présente « des éléments de dangerosité psychiatrique », aux dires de l’expert, sa place serait plutôt dans un hôpital psychiatrique que dans une prison où il pourrait présenter un danger tant pour les détenus que pour les gardiens, mais puisque son épouse et ses enfants restés au Pakistan semblent lui manquer, pourquoi ne pas l’y reconduire ?
L’homme qui était entré par effraction dans la basilique de Saint-Denis est reparti ce vendredi du tribunal de Bobigny, avant la clôture des débats, dans de grands éclats de voix. Et sans s’expliquer sur son geste. Ce Pakistanais de 41 ans était poursuivi pour avoir volé et détérioré, entre le 24 février et le 3 mars, des pièces métalliques de l’orgue classé, et aussi brisé deux vitraux du XIXe siècle. Il a été confondu par son ADN. Le prévenu a été relaxé du vol des plaques de l’orgue. « Il apparaît impossible qu’il ait pu faire cela tout seul », a indiqué la présidente. Mais il a été déclaré coupable de la dégradation des vitraux. L’altération de son jugement ayant été retenue, il n’est condamné qu’à sept mois de prison, avec maintien en détention. Vociférant dans le box, tantôt en ourdou, tantôt en anglais, ni la présidente, ni son interprète, ni même son avocate, Me Khady Bâ, ne sont parvenues à le ramener à la raison. « Monsieur, shut up ! (NDLR, taisez-vous !) », finit par lâcher la présidente, Bénédicte Berry. Pour l’amadouer, elle s’était inquiétée de son état de santé. Le prévenu était apparu la jambe plâtrée. Elle réussit quand même à lui arracher une explication. Il aurait été blessé pendant un match de foot. Lui reprend avec la même agitation : « I respect this police, this everything… (je respecte cette police, je respecte tout) », en brandissant l’une de ses béquilles. Ce sans-papier évoque ses enfants et sa femme qu’il a laissés au Pakistan, il y a 4 ans. Il ne comprend pas « qu’on l’inculpe avant d’entendre ses explications ». Finalement, la présidente va renoncer à poursuivre l’audience en sa présence, malgré l’insistance du procureur : « Monsieur n’a qu’une jambe dans le plâtre. Il nous fait du cinéma ». C’est dans une atmosphère beaucoup plus sereine que les débats reprennent finalement. L’expertise psychiatrique confirme que l’intrus de la basilique est atteint d’une « pathologie déresponsabilisante et délirante ». Il présente « des éléments de dangerosité psychiatrique », « les faits peuvent être en rapport avec son état », indique l’expert. Pour le ministère public, au contraire, tout démontre que ce jour-là, l’homme jouissait de toutes ses facultés mentales. « Il a escaladé un échafaudage, sectionné les fils de l’alarme et s’est introduit dans l’orgue Cavaillé-Coll pour dérober des lests en fonte, d’un poids total de 150 à 200 kg. Quand on est capable de faire tout ça, c’est que votre jugement n’est pas si altéré que cela », assène le procureur Didier Allard. Ce dernier a réclamé une peine, relativement sévère, de 2 ans de prison ferme, dont un an avec sursis avec mandat de dépôt. Car il rappelle : « Ce dossier n’est pas anodin. Il ne s’agit pas d’une épicerie, mais du symbole de l’histoire de France ! C’est dans la basilique de Saint-Denis que sont enterrés 43 rois et 32 reines de France. S’en prendre à ce bâtiment, ce n’est pas rien. Il faut envoyer un message clair : on ne peut pas entrer dans un tel édifice en toute impunité ». Le prévenu était passible de sept ans de prison pour avoir vandalisé un joyau du patrimoine.
Source : Le Parisien, 10 mai 2019.