Nouvelles de France publie le témoignage d’un chrétien irakien, paroissien de Notre-Dame du Salut à Bagdad, dont plusieurs amis sont morts dans l’attentat qui a touché l’église à la Toussaint 2010 :
“Bachar (…) parle à peine quelques mots de français ; c’est un professeur syrien qui traduit ses propos de l’arabe. Il a installé un drapeau d’Irak, bien visible aux yeux des étudiants français rassemblés dans cette aumônerie pour écouter son témoignage. Un grand jeune homme brun et mince, aux cheveux longs, au regard pénétrant si typique des orientaux. “Nous vivons en communauté, en Orient. Quand un membre du groupe est blessé, c’est tout le groupe qui est blessé”. Il cherche à nous faire comprendre, comme il peut, sa blessure, qui est celle de l’Irak, et de ses frères chrétiens. C’est sur un air arabe qu’il commence à nous parler de ses amis Tha’er et Wassim, dont il nous montre des photos. Wassim, c’est son ami depuis l’âge de 15 ans : club de football, groupe biblique, paroisse… ils ne se quittaient plus. Tha’er est un orphelin qui a porté sa famille après la mort de son père pendant la guerre contre l’Iran, avant d’entrer au séminaire. Les photos défilent en même temps que les souvenirs : l’ordination diaconale de Wassim et Tha’er, leur ordination sacerdotale, un voyage au Vatican, une farandole de soutanes. Ici, dans un centre d’accueil pour handicapés. Là, avec la famille, en train de rire, de plaisanter. Un groupe d’étudiants universitaires, contre vents et marées. Le jour de son ordination, Tha’er a choisi une phrase : “Ma vie, c’est le Christ”. Et puis d’autres visages défilent : ce médecin, ce chef de chorale… Une jeune mariée. Bachar les connaissait tous. “Cette jeune mariée a appris qu’elle était enceinte le matin du 31 octobre. Elle attendait la fin de la messe pour l’annoncer à son mari”. Sur la photo, la jeune femme en blanc a l’air lumineux de celui qui choisit son chemin. Mais ce jour là, dans cette église de Bagdad de rite syriaque, il n’y a pas eu de fin de messe.
La voix de Bachar s’est mise à trembler alors qu’il raconte. Nous avons compris : son cœur est avec ses frères, dans cette église, ce jour là. “Tha’er prêchait en chaire. Pendant ce temps, Wassim était au confessionnal. Il y avait aussi un prêtre âgé dans l’assemblée. Ce jour, pour les syriaques, est un jour de bénédiction de la communauté. L’Évangile est celui de la reconnaissance par les apôtres de l’identité du Christ : « Pour vous, qui suis-je ? » Tha’er l’avait écrit : sa vie, c’était le Christ”. Ce jour-là, il n’a pas pu finir son homélie… Lire la suite !
Côme Dubois