Il y a quelques chrétiens qui se sont exprimés pour dire que la vision de Castellucci dans sa pièce Sur le concept du visage du fils de Dieu, est fondamentalement chrétienne… J’admets que certains de ceux qui expriment cette analyse sont sincères – pour d’autres, j’ai des doutes… Mais pour comprendre la pensée de Castellucci, si étonnamment complexe pour des gens à l’esprit droit que certains s’y sont empêtrés, le mieux n’est-il pas de savoir ce qu’il pense ? Vraiment. Avenir de la Culture vient de mettre en ligne sur son site la traduction d’une partie d’un entretien que Castellucci a accordé à Jonathan Marshall pour la revue australienne RealTimes Arts, et publié dans son n° 52 (décembre-janvier 2002), alors que le dramaturge était à Melbourne pour présenter une autre de ses œuvres, Genesi. Le titre de l’entretien publie dans RealTimes Arts est « L’Ange de l’art est Lucifer ». Lisez et méditez… D.H.
– Vous avez déclaré que « la Genèse m’effraie plus que l’Apocalypse» car elle représente « la terreur d’une possibilité sans fin ». Ceci semble s’inspirer beaucoup des écrits d’Antonin Artaud et de Herbert Blau, ainsi que des doctrines gnostiques et kabbalistiques par lesquelles Artaud lui-même était influencé. Seriez-vous d’accord avec les idées habituellement associées à cette cosmologie ? Par exemple, Artaud prétendait qu’un chaos terrifiant existait avant la Création et que celui-ci est resté éternellement présent, latent ou immanent à l’intérieur de chaque existence quotidienne. Il prétendait que ce “chaos” est le “double” logique du théâtre. Le but le plus élevé et la vertu la plus éminente du théâtre sont-ils donc de pouvoir représenter – ou au moins d’arriver près de représenter – ce chaos à travers une représentation vivante ?
Castellucci : […] Si le grand domaine des possibilités ouvertes appartient à Dieu, le fait que certaines possibilités ont été mises ensemble et produites doit appartenir – selon certaines traditions kabbalistiques – au poids du corps lui-même. Dieu doit se transformer Lui-même dans quelque chose “de la chair” afin de pouvoir manifester des possibilités qui, autrement, demeureraient irréalisées dans un monde inconsistant. On peut [selon ces traditions] expérimenter des possibilités à travers l’invocation d’éléments matériels, charnels, et, à travers une conjonction de ces éléments, expérimenter avec eux.
Le théâtre n’est pas quelque chose qui doit être “reconnu” : « Je-vais-au-théâtre-pour-reconnaître-les-études-sur-Shakespeare-que-j’ai-faites ». Ce ne devrait pas être ça, mais plutôt un chemin à travers l’inconnu, vers l’inconnu. Ce que moi et d’autres avec une conception similaire avons essayé de faire au cours des années a été de porter haut le scandale de la scène et de le maintenir toujours vibrant. […]
À ce propos, je crois que la pensée d’Antonin Artaud est d’une importance fondamentale pour la compréhension totale de la forme occidentale. Il plonge le problème de la forme dans un bain de violence qui réveille ce qui entretient un vrai théâtre. C’est là que la forme devient esprit. On parle ici, en fait, sur l’alchimie de la transformation, de la transmigration d’une forme dans une autre. Il y a évidemment un aspect du catholicisme qui influence et qui est inhérente à ce type de théâtre, qui est lié au moment où, pendant l’Eucharistie, l’Hostie est transformée dans le Corps du Christ. Ce fait eucharistique est aussi une idée que l’on trouve chez Artaud : cette idée de transformer un corps, de donner un corps, de couper un corps en morceaux, de libérer un corps de ses organes : ce sont tous des éléments qui proviennent d’une telle conception chrétienne. […]
– Croyez-vous que ce type d’idées ont pris une importance particulière à la lumière d’événements du XXe siècle tels l’Holocauste, et même d’événements plus récents comme les guerres en Yougoslavie, le 11 septembre et la décimation de l’Afghanistan ?
Castellucci : Les événements que vous avez rappelés, les massacres, les génocides, les désastres que l’humanité a expérimentés dans son histoire récente, constituent un abîme qui est nécessairement connecté avec la Création. Pendant la Création, c’est le Verbe de Dieu qui créa ; dans ces événements, cependant, il y a Son silence. Le théâtre est appelé à la rescousse pour embrasser les hauteurs et les abîmes de l’expérience humaine – mais non pas par l’illustration, ni à travers la production d’information. L’expérience de l’abomination est trop profonde pour être consommée à la surface [de simples apparences]. Il est maintenant nécessaire que nous commencions tous à envisager le terme “tragédie” de manière à repenser collectivement le destin de l’humanité. Le théâtre est appelé à répondre à cette tâche par la radicalité de sa forme, qui est celle d’un art vivant.
– À partir de cela, êtes-vous d’accord que tous les actes créatifs constituent un acte de violence, ou au moins une violation du tabou contre la création? J’ai à l’esprit ici votre commentaire que Lucifer, l’ange déchu est le premier artiste avec lequel l’humanité peut s’identifier.
Castelucci : Naturellement, le thème de la Genèse met en évidence le problème du Commencement. Au Début chaque artiste sait que la scène vide est une mer ouverte de possibilités. C’est aussi ce qui constitue la ‘terreur de la scène’. Ce n’est pas – au moins en ce que je suis concerné – une terreur ou une peur du vide en soi, mais plutôt une terreur de plénitude : il y a trop de monde. La quantité nous submerge. La matière est obscure. Par conséquent, chaque fois que l’artiste élabore sur ce chaos, de manière à faire en sorte que quelque chose sorte de lui, on reconnecte ces possibilités. Des lignes et des constellations sont alors créées… par parthénogenèse, presque indépendamment de la personnalité de l’artiste. En ce qui concerne le Commencement et la Fin, il est évident que le théâtre a en soi, ontologiquement, dans ses textures profondes, ce problème du Commencement et de la Fin — parce qu’ils sont co-pénétrés. Le théâtre est un art corporel par excellence, lequel par définition, quand il “est vraiment là” en face du spectateur, il finit aussi en même temps. Le théâtre est né au même moment qu’il meurt, et vice versa.
Quel sens y-t-il à répéter maintenant ces paroles qui sont les premières paroles de la Genèse elle-même et sont donc les choses elles-mêmes, le monde lui-même ? Ces paroles de la Genèse sont-elles les paroles qui ont causé l’existence du monde, et donc aussi celles qui ont fait émerger la scène ? La seule personne qui pouvait supporter le poids de ces paroles créatrices est celui qui le premier parla un “double langage”, celui qui le premier a pris les habits d’un autre – à savoir Lucifer. Tout au long de l’histoire de l’humanité, Lucifer s’est toujours fait entrevoir à travers des déguisements et des costumes, en adoptant les paroles de quelqu’un d’autre. Il a aussi fait cela au Début, en revêtant la peau du Serpent et la langue du Serpent. Il a dédoublé pour la première fois les paroles de quelqu’un d’autre, en disant: « Est-ce vrai ce que Dieu a dit ? », créant ainsi une forme de mimétisme, une forme de dédoublement du langage. Il est en fait le premier à travailler dans la surabondance du langage, pour exploiter le théâtre comme une énergie, en donnant ainsi origine à l’art. L’art trouve dans ce noyau d’origine sa relation privilégiée avec le mal. Le mal est ailleurs l’aspect extrême de la liberté que Dieu a concédé à tous les êtres. Lucifer vit dans l’état de sa condamnation qui est, très exactement, de vivre dans la région du non-être. Pour revenir à l’état d’être, Lucifer est contraint d’assumer le déguisement de quelqu’un d’autre, la voix de quelqu’un d’autre. L’art devient nécessaire quand on n’est plus dans le Paradis. En ce sens, la seule personne qui pouvait endurer l’acte de redire les paroles de Dieu, et encore plus dans leur langue originale hébraïque, c’était Lucifer. […]
– Cela semble suggérer que tant le contenu que le style de Genesi visent à créer un sens très étrange du temps et de la temporalité – ou éventuellement un état où le temps ne semble pas passer. Vous vous êtes décrit vous-même comme dans un « état de suspension » qui « annule le temps ». Comment y parvient-on ? C’est bien ce que j’ai décrit ci-dessus que vous essayez de faire passer?
Castellucci : […] Mon spectacle Genesi n’est pas uniquement la Genèse biblique, mais c’est celle qui met au monde (en scène) ma prétention rhétorique de refaire le monde : elle met en scène les aspects les plus vulgaires de mon être : l’artiste, celui qui veut voler à Dieu le dernier et le plus important des sepiroth [1] . Voilà le secret de Polichinelle : voler à Dieu.
Bref, la Genèse m’effraie beaucoup plus que l’Apocalypse. La terreur de la pure possibilité est là dans cette mer ouverte à toute possibilité. Et là je me perds dans la forme. Car l’Ange de l’Art c’est Lucifer. C’est le premier Être qui endosse et assume le costume et les vêtements d’un autre pour Être. Il a dupliqué le langage et l’a traduit, il est à lui seul l’art de la transformation. Il vient de la région du Non-Être. L’unique possibilité pour lui de revenir dans la zone de l’Être est de le faire dans la voix, le corps, le nom d’un autre, et ça, c’est le théâtre. Cette zone de non-être est la condition génitale de chaque création, elle permet cette nécessaire destruction qui conjure et détourne toutes les superstitions.
[1] Elément de base de la numérologie kabbalistique hébraïque. La Kabbale traite de la nature de Dieu et de son essence. La divinité justifie son existence en étant active et créatrice. C’est pourquoi elle passe par les sepiroth ou “intelligences” qui émanent de lui comme des rayons de lumière. Les dix sepiroth représentent l’évolution progressive du monde à partir du néant. Ils sont le symbole de l’homme primordial et de l’homme céleste dont l’homme terrestre n’est que l’ombre.
Source : Avenir de la Culture
A titre personnel, je n’en pense pas moins : http://www.leforumcatholique.org/message.php?num=613509
Est-ce assez clair?
Je suis consternée par les progrès de ce que Louis Pauwels* a désigné par le terme de sida mental ( pour mémoire perte des défenses immunitaires intellectuelles, morales, psychiques, spirituelles) auprès de personnes estimables, à priori ni stupides ni perverses, dans le climat délétère qui est le nôtre. A force de respirer les effluves
empoisonnées de l’air du temps, et de condamner l'”arrivée d’air” par tous les moyens, rares seront ceux qui échapperont à l’anoxie cérébrale.
* il n’est pas question ici de faire son apologie, mais de rappeler cette formule qui décrit bien les effets de la culture de mort.
Merci M. Hamiche de toutes vos réinformations qui nous confortent dans celui à qui nous avions pensé. Le problème c’est que beaucoup de gens aujourd’hui, sans doute de bonne foi (y compris des prêtres)mais peut-être faute d’une foi suffisamment solide et de base, l’ont évacué ce Malin (pour certains ce n’est pas vraiment leur faute car on ne leur a pas suffisamment appris, et l’on a même raillé l’idée, soit disant à la limite de la superstition). En ayant voulu évacuer Dieu de leur vie, ils ont laissé encore plus de place au Malin. Et le Malin fait toujours croire qu’il n’existe pas pour mieux nous berner.
Certes cette affaire est récupérée par beaucoup de tous bords (laïcistes, catholiques progressistes et ceux d’une certaine religion majoritaire en France) et le diable est en train de se déchaîner pour mettre encore plus de pagaille, mais les jeunes qui prient sont admirables et savent où ils vont. Cela nous donne beaucoup de réconfort.
Merci de cette information.Je crois que notre Roméo n’est pas luciferien au sens spirituel du terme,qui implique cette haute perversion qui alterne la séduction et la terreur,mais toujours avance masqué.Roméo n’est pas de cette hauteur.Il joue,il en fait trop.Il fait tout en largeur faute de profondeur.c’est son gagne pain.Il est le produit de la déconstruction qui sévit dans tous les milieux philosophiques et artistiques depuis la désillusion du marxisme.Ce sont des “paumés”, n’en faisons pas des Héros.Le modèle de ce type de nihilisme fut Artaud qui eut certes des talents,mais sombra dans une démence lamentable.Ses derniers écrits sont truffés de “Caca” “caca””caca”.La maladie mentale avérée n’est pas constructive, ni productive.C’est une déconstruction lente et progressive.Rien à voir avec l’Art créatif.Que Romeo se trouve une juliette et tout rentrera dans l’ordre…merci
Parce que vous en doutiez ? Il se dit catholique … en fait il utilise la perversité de l’ange prévaricateur pour tromper les incrédules. Ce qui m’attriste c’est de voir des Ecclésiastiques le soutenir, du moins faire bonne figure à ces côtés, c’est là jouer avec le diable.
Et vive la jeunesse Chrétienne de France qui n’est pas encore happée par les trahisons intellectuelles du monde, ils sont comme vierge, c’est magnifique. Car le pire est à venir avec GOLGOTA PICNIC contre qui la seule et grande réponse sera une procession du saint Sacrement sur les champs, direction <notre Dame pur une grand Messe de réparation et d'action de Grâce, avec tOUTE la Tradition et les bonnes volontés. DEO GRATIAS !!!
il ne fait aucun doute que ce Monsieur castellucci est “de ce monde”.. et la sainte bible nous dit bien que ceux qui sont de ce monde ne sont pas de Dieu… Il est donc facile de savoir qui ? sert ce monsieur castelluci…
Cette interview me rappelle la vieille maxime qui dit que
le diable est un excellent théologien.
J’attends que les catholabo mondains et progressistes nous expliquent encore que Castellucci a fait une pièce “profondément chrétienne”, que le “you are my sheperd prenait le dessus sur le NOT qu’y ajoute Castellucci”, comme on a pu le lire ici et là…
Je pense qu’on ne les entendra pas commenter.
Quant à Castellucci, il fallait vraiment être niais, religieusement, et politiquement niais pour ne pas l’identifier immédiatement comme un sataniste.
Je crois simplement que l’on donne beaucoup trop d’importance à ce type bobos et Cie. C’est un athé convaincu,son cerveau est très malade, la maladie de l’orgueil.L’orgueil de faire la une de toutes les conversations enfin ..presque! et l’orgueil ne vient pas de Dieu.Pour moi j’ai pleuré devant les lectures de ce spectacle lamentable en accord avec tous ces jeunes et devant l’absence des représentants de notre Eglise.Analyser le cerveau de ce pauvre type ne m’intéresse pas.Odette de Lannoy
Lex explications de l’auteur sur le chaos et le reste, sont heureusement trop compliquées pour moi.
Mais rien qu’à l’odeur de m…. (synthétique parait-il !)qui parait-il est diffusée dans le théâtre, on voit sans trop d’efforts qu’on n’est pas au paradis avec le choeur des anges.
Certes, il ne s’agit pas d’une odeur de sainteté..Crotte alors!
Vous comprendrez bien des choses le jour où vous aurez saisi que les satanistes adorent travestir leur vraie personnalité et leurs idées pour mieux berner le vulgus pecum.
Cela ne dérangent nullement les satanistes de mentir & vivre dans le mensonge perpétuel. Au contraire.
Rouler les braves gens dans la farine est le “péché mignon” favori des satanistes.
Si vous voulez que les satanistes se mettent à livrer le fond de leur pensée, c’est très simple: “donnez leur un masque et ils se mettront à vous dire la vérité”.
Satan n’est-il pas le père de tous les mensonges après tout?…. 😉