Dans un entretien accordé à Asia News, l’agence d’information de l’Institut pontifical des Missions étrangères, le Père Greiche Rafiq, porte-parole de la Conférence des évêques catholiques d’Égypte, commente les récents événements politiques survenus en Égypte et notamment la révocation par le Président Mohammed Morsi, de très hauts cadres de la junte militaire égyptienne qui détenait la réalité du pouvoir, et notamment de son chef le maréchal de l’air Hussein Tantawi. Cette révocation – officiellement, c’est une « démission » – « pourrait s’avérer positive et mettre un terme au chevauchement de pouvoir entre l’institution militaire et les institutions civiles qui gênent le bonne gouvernance du pays », déclare le porte-parole de l’épiscopat. Toutefois, les décisions du Président égyptien ont généré beaucoup de critiques : « Comme dans toutes les démocraties, un président peut renouveler les dirigeants lorsqu’il assume le pouvoir. Mais ce qui nous préoccupe, c’est le trop grand pouvoir des Frères musulmans et le risque d’islamisation de la société égyptienne (…) Beaucoup de partis, tout en acceptant la nécessité du changement, reprochent à Morsi d’avoir agi unilatéralement sans avoir consulté les autres forces politiques, ce qui a eu pour effet d’augmenter la méfiance envers les islamistes. Tous les Égyptiens qui croient en un État laïc craignent les Frères musulmans, mais débarrassée de l’interférence excessive des militaires, la politique sera plus transparente et nous saurons qui prend les décisions, bonnes ou mauvaises. Dans le cas où des décisions impopulaires seraient prises, les Frères musulmans deviendront la seule cible des manifestations et des protestations ».
D.H.
Source : Asia News
Il me semble que c’est faire preuve de beaucoup de candeur de croire (ou de faire semblant de croire) que la clarification politique amène les forces politiques à plus de compassion les unes pour les autres. Les différents groupes politiques ou religieux qui se juxtaposent en Egypte ne fonctionnent pas du tout comme les groupes politiques ou religieux en Europe. En Egypte les groupes se constituent sur la base de l’origine des individus (un tel, fils d’un tel, appartiendra très probablement au même groupe que son père ou son grand-père); c’est en quelque sorte une prédestination. En Europe les groupes se constituent beaucoup plus selon des idées communes ou des intérêts communs. Il y a beaucoup moins d’étanchéité entre les groupes.
Si l’armée était en Egypte un élément important de stabilisation politique ou religieux ( on a pu en douter à certains moments !) il n’y pas intérêt pour les minorités à ce que le pouvoir de l’armée diminue.
Si on peut appeler l’armée égyptienne actuelle un facteur de modération (dans le sens où elle freine les transformations politiques et certains dérapages prévisibles de la société ; je répète qu’on peut en douter) il est probable que cette armée est un contre-pouvoir avec lequel il faut compter.
Toute société a besoin de contre-pouvoirs. De tels contre-pouvoirs ont existé même dans l’ancien Régime ( par exemple les Parlements provinciaux dans la Monarchie française). Sans contre-pouvoir on est bien près de la dictature et du totalitarisme. Je pense en ce moment aux communismes soviétique, chinois, vietnamien, cubain ; à la dictature nazie ; à la théocratie iranienne.
Si la situation politique se dégrade, il n’est pas facile de générer un nouveau contre-pouvoir. Les individus qui appartiennent aux minorités sont alors terriblement isolés et souffrent.
FT